Avis relatif à la sécurité des cartouches de gaz perçables type C 200 et des appareils qu’elles alimentent

La Commission de la Sécurité des Consommateurs,

VU le code de la consommation, notamment ses articles L. 224-1, L. 224-4, R. 224 ‑ 4 et R. 224-7 à R. 224-12
VU la requête n° 04-078
 
Considérant que :


1. La requête

La Commission a été saisie (requête n° 04-078) par le Centre régional des grands brûlés de Marseille du danger présenté par des cartouches pré-remplies de gaz liquéfié de marque Campingaz ou IdéalGaz dites “percutables” ou “perçables” :
« Chaque année de nombreux accidentés sont reçus dans les centres de grands brûlés en France après explosion de cartouches pré-remplies de gaz liquéfié (marque Campingaz modèle C206, marque Idealgaz). Ces accidents surviennent généralement lors de l’utilisation de ces cartouches dans un espace clos à proximité d’une flamme. L’apparition de cartouche à valve (marque Campingaz modèle CV 270) évitant les fuites de gaz n’a pas mené à la disparition de ces anciennes cartouches. Bien au contraire, la norme européenne EN 417, mise à jour en octobre 2003, valide l’utilisation de ces cartouches sans valve. Devant la gravité des brûlures et la fréquence non négligeable des accidents, il nous semble nécessaire d’alerter la CSC ».


II. La problématique

Ces cartouches fabriquées par plusieurs industriels (Campingaz, Coleman…) sont vendues par centaines de milliers de par le monde et servent à alimenter des réchauds, des lampes de camping, des lampes à souder. De faible poids et de peu d’encombrement, elles sont commodes à transporter.
 
Ces cartouches sont très simples à fabriquer puisqu’il s’agit en fait d’un container fermé disposant sur le dessus d’une zone de plus faible épaisseur destinée à être percée (“percutée”) par un dispositif spécial lui-même solidaire de l’appareil d’utilisation.
L’ensemble du dispositif est muni de joints destinés à assurer l’étanchéité du dispositif complet de la cartouche lors de la percussion.
Toutefois, un certain nombre d’utilisateurs ne parviennent pas à percuter la cartouche dans les conditions requises, provoquant des fuites de gaz plus ou moins importantes qui vident rapidement la cartouche. Un autre cas de figure, rare heureusement, est constitué par des utilisateurs voulant changer leur cartouche de gaz alors que celle contenue dans l’appareil n’est pas complètement vide.
Le gaz contenu dans la capsule se présente sous forme liquide et se transforme en gaz dès l’ouverture de celle-ci (détente), ce qui produit un froid intense (principe du réfrigérateur). Ce froid est générateur de brûlures (brûlure froide) dont les effets sont similaires à celles de la brûlure chaude et dont les conséquences peuvent être très graves (bien que, normalement, sur une surface du corps relativement restreinte).
Le gaz qui s’échappe de la capsule ouverte peut aussi s’enflammer[1]. L’inflammation se prolonge jusqu’à épuisement complet du gaz – sans possibilité réelle d’interruption – et peut, dans certaines conditions (rares heureusement), conduire à une explosion.
La Commission a interrogé sur ce sujet la société Campingaz qui lui a communiqué les précisions suivantes :
“Faisant suite à votre courrier cité en objet, nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint les documents demandés, à savoir :
 
- Le rapport de conformité aux exigences de la norme EN 417 des cartouches C206 Campingaz, établi par l’organisme notifié APAVE Groupe cité dans l’arrêté du 2 décembre 2003 portant sur l’habilitation d’organismes relatifs aux équipements sous pression transportables.
 
Ce document démontre que les exigences essentielles de sécurité imposées par l’article L.221-1 du code de la consommation sont respectées.
 
- Le certificat ISO 9001 LRQA de la société Application des Gaz à St Genis-Laval couvrant l’activité de fabrication de cartouches GPL Campingaz.
 
- Les plans d’impression des cartouches Campingaz C 206 vendues en France, à savoir les plans n°039375, 039376, 039374.
 
- Le rapport CEN/TC 181 N925rev émis par le groupe de travail 4 du comité technique CEN I TC181 dédié aux appareils GPL à pression directe, faisant suite au mandat M327 de la Commission européenne pour répondre aux changements d’habitude des consommateurs qui ne lisaient plus les modes d’emploi et les instructions, et augmenter le niveau intrinsèque de sécurité lors du remplacement des cartouches à gaz dans les appareils portables à cartouche.
 
Ce rapport conclut que le design et la conception de certains appareils équipés de cartouches perçables devront être modifiés pour augmenter la sécurité intrinsèque des appareils lors du changement de cartouches perçables, mais en aucun cas les cartouches perçables ne sont mises en cause.
 
- Un rapport en langue anglaise envoyé en juillet 2003 par Application des Gaz (société Campingaz) à M. K., Responsable de la Directive “Appareils à Gaz” au sein de la Commission Européenne, démontrant que le risque de fuite lors de la percussion des cartouches perçables est toujours dû à une mauvaise manipulation de l’opérateur lors du changement de la cartouche dans l’appareil. En effet, si l’utilisateur ne suit pas les instructions du mode d’emploi de l’appareil, ni les instructions et les logos explicatifs inscrits sur les cartouches C206, une fuite due au mauvais alignement de la cartouche dans l’appareil est possible, y compris avec des cartouches perçables équipées de système interne de limiteur de fuite comme démontré dans le rapport.
 
Vous nous indiquez également dans votre courrier que les fuites engendrées lors du perçage des cartouches provoquent de graves brûlures. Il apparaîtrait à l’évidence que le changement des cartouches n’est pas effectué en suivant les instructions du mode d’emploi fourni avec l’appareil, et que ce changement n’est pas opéré dans un endroit aéré, loin de toute source d’inflammation comme indiqué sur les notices d’emploi de nos appareils et sur nos cartouches C206.”
 
En effet, comme y incitent cette réponse et les analyses effectuées, loin de limiter l’analyse aux cartouches, il faut l’étendre au couple “composants – cartouche” et au dispositif de branchement de l’appareil, l’ensemble devant être parfaitement sécurisé.
 
Légende : 1 et 2 : dispositif d’utilisation, dans ce cas “brûleur”
3 : robinet
4 : dispositif d’étanchéité
5 : cartouche
6 : corps de l’appareil
7 : pointeau de percement de la cartouche
  
La réponse apportée par le fabricant montre que le maniement et l’adaptation des cartouches à l’appareil peut présenter des difficultés et que certains consommateurs, moins adroits, peuvent être victimes d’un “accident”.
La société Campingaz reconnaît dans sa réponse que le bon emploi par le consommateur suppose le strict respect de plusieurs conditions :
-            changement des cartouches effectué en suivant les instructions du mode d’emploi fourni avec l’appareil, alors même que la notice n’a pas vocation à accompagner en toutes circonstances un appareil qui est destiné à être utilisé en randonnée, camping et se transmet sur plusieurs générations ;
-            que ce changement soit opéré dans un endroit aéré, ce qui exclut de l’utiliser dans un appartement, un atelier, une tente ;
-            loin de toute source d’inflammation, comme cela est indiqué sur les notices d’emploi des appareils et sur les cartouches C206. Ces indications sont présentées de deux manières différentes sur les cartouches de gaz Campingaz ou Coleman :
.    littérale en caractère d’environ 1,5 mm de haut blanc sur fond bleu dans un carré de 6 cm de coté (environ 134 mots pour les conditions de sécurité générales, 77 pour le changement de cartouche), en plusieurs langues,
.    sous forme de 6 pictogrammes (surface totale 2,8 cm x 5,6 cm) représentant (pour deux formes différentes d’appareil) les 3 stades du changement : dévissage du robinet, introduction de la cartouche neuve, revissage du robinet.
 
Pour autant, le consommateur peut être amené à percuter la cartouche alors qu’elle n’est pas correctement positionnée sur le dispositif de percement (défaut de centrage) ou correctement immobilisée dans le porte-cartouche (la pression du gaz peut alors “chasser” la cartouche et provoquer la fuite du gaz). Ceci peut, notamment, provoquer des accidents lorsque l’utilisateur tente de remplacer la cartouche vide sans dévisser le dispositif d’utilisation/percement.
Deux types de socle, parmi les plus répandus, sont particulièrement difficiles à manipuler car leur fermeture (une fois la cartouche neuve introduite) n’est pas une manœuvre simple à effectuer.
Par exemple, dans le cas montré par la photo ci-contre,
la pièce triangulaire (claire) est difficile à introduire dans les trois ergots. La cartouche peut donc être mal fixée et ceci peut entraîner un début de fuite qui, comme toute détente, provoque alors une sensation de froid intense qui peut conduire l’usager surpris à lâcher l’appareil et donc à laisser la cartouche se vider.
 Autre exemple, dans le cas du socle à deux anses, il est très difficile, lorsque le robinet n’a pas été dévissé, de tenir la cartouche et de refermer en même temps les deux anses sur le fond de celle dernière, ce qui peut également être à l’origine d’un accident.
 
 


III. Les auditions

Le rapporteur a procédé à plusieurs auditions.
A – Audition de M. B., Consultant (société D.B. Consultants) et M. G., Directeur technique de la société Guilbert Express, le 9 mai 2005.
B – Audition de M. C., Directeur recherche et développement de la société Campingaz Coleman et de Mme N., juriste attachée à la société, le 24 juin 2005. Cette audition a donné lieu à un compte rendu de réunion rédigé par la société Campingaz.
C – Audition de M. C. du Bureau de normalisation du gaz (BNG) et M. B. du Comité Français du Butane et du Propane, le 19 janvier 2006.
D – Audition de Mme C. de l’AFNOR le 1er mars 2006.
De ces auditions il ressort  que :
- Le parc mondial des appareils à cartouches de gaz percutables peut être évalué à environ 35 millions d’unités. Les principaux fabricants sont Coleman, Campingaz, Kemper (Guilbert Express). Selon certaines personnes auditionnées, les Etats-Unis et le Japon auraient rendu le dispositif de sécurité anti-fuite obligatoire, mais pour ce qui concerne ce premier pays, ceci reste à vérifier.
- Ces appareils, de conception relativement simple et robuste, ont une durée de vie importante. Ils sont transmis entre utilisateurs (notamment au sein des familles), le plus souvent sans le mode d’emploi.
- De nombreux incidents, notamment lors de fuite sans inflammation, ne sont pas répertoriés alors même qu’ils auraient pu conduire à un accident grave (la source d’ignition n’est pas toujours le fait de l’utilisateur lui même mais peut être provoquée par une autre personne ou un événement extérieur – étincelle électrique notamment).
- Les deux fabricants auditionnés, Guilbert Express et Campingaz, disposent de modèles de cartouches sécurisés même si, dans le cas du second, il ne les commercialise pas. Coleman, qui est surtout présent sur le marché américain dispose d’un modèle sécurisé de cartouche.
- Les premières questions relatives à l’utilisation des cartouches de gaz ont surgi, il y a un peu plus de deux ans, quand les Pays-Bas ont saisi la Commission Européenne pour marquer leur opposition à une norme qui accepte des réservoirs de gaz qu’ils jugent dangereux, c’est-à-dire les cartouches sans dispositif anti-fuites. En effet, ces cartouches, simple d’apparence, peuvent donner lieu, si le mode d’emploi de fixation dans l’appareil d’utilisation n’est pas scrupuleusement respecté, à des fuites de gaz qu’il est le plus souvent impossible d’interrompre (une fuite vide la cartouche en environ 6 à 8 secondes).
- Comme on l’a dit ci-dessus, cette fuite de gaz peut provoquer :
-          des brûlures froides lors de la détente du gaz qui fuit,
-          des brûlures suite à l’inflammation (inévitable en présence d’une source d’ignition) du gaz qui produit une boule de feu d’environ 2 mètres de diamètre (une vidéo illustre ce fait) à une température d’environ 1000 °C,
-          des explosions, si la cartouche ‑ qui a une limite d’explosibilité faible ‑ se vide dans une pièce non ventilée.
- Le dispositif anti-fuite a un coût qui serait d’environ 25 % du prix de la cartouche non dotée de ce dispositif. Ce surcoût diminuerait de manière significative en cas de production industrielle.
- La société Campingaz fabrique et commercialise par an, en Europe, environ 500 000 appareils à gaz (réchauds, luminaires…), ainsi qu’environ 50 millions de réservoirs (cartouches…) destinés à les alimenter.

- Les cartouches commercialisées sont de plusieurs types :
-       cartouches type 200 sans valve (diamètre intérieur de 86 mm contenant environ 190 g de gaz – mélange de butane et de propane), comme la cartouche C 206,
-       cartouches à valve de dimension identique aux cartouches ci-dessus. Ces cartouches sont extérieurement identiques à celles sans valve. Afin de les reconnaître, des fabricants ont introduit une bille métallique dans le réservoir pour assurer une reconnaissance sonore,
-       cartouches à valve type aérosol,
-       cartouches munies d’une valve à cheminée filetée, de contenance en principe plus importante (CV 270…).
- Les cartouches qui semblent être la source d’incidents sont en majorité du type C 206 avec ou sans valve, car ce sont celles qui sont le plus commercialisées. Ces incidents ont généralement lieu lors du remplacement de la cartouche vide par une neuve.
- Ces accidents sont en grande partie dus à un non respect du mode d’emploi (qui figure sur chacune des cartouches en caractères d’environ 1,5 mm de hauteur – blanc sur fond bleu pour les cartouches Campingaz par exemple).
- Le consommateur ne sait pas toujours correctement introduire la cartouche de remplacement, d’autant que certains systèmes ne permettent pas un guidage correct et facile de celle-ci : une cartouche introduite légèrement de travers provoque une fuite lors du perçage et éventuellement lors de son éjection. En effet, le remplacement doit normalement s’effectuer après dévissage du robinet. Après positionnement adéquat et blocage de la cartouche neuve dans le corps de l’appareil, le robinet est revissé assurant ainsi un perçage correct.
- Une étude effectuée en 2002 par l’université de Delft (Delft University of Technology – Hollande) a confirmé ces difficultés, ainsi que le non respect fréquent des modes d’emploi.
- D’après la société Campingaz, même une cartouche de type C 206 munie d’une valve peut, si elle est introduite de travers, conduire à une fuite, néanmoins moins importante que dans le cas d’une cartouche sans valve.
On peut légitimement se demander si ce produit (appareil et cartouche) a été conçu en tenant compte du comportement raisonnablement prévisible du consommateur, attiré par la simplicité apparente de l’objet et de son maniement.


IV. La normalisation

A. Les cartouches

Les cartouches relèvent au plan communautaire de la directive 99/36/CE du 29 avril 1999 relative aux équipements sous pression transportables. Cette directive a été introduite en droit interne par le décret n° 2001-386 du 3 mai 2001 portant transposition de la directive 1999/36/CE. Ce décret renvoie indirectement à la norme NF EN 417 (octobre 2003) pour l’évaluation de la conformité des cartouches de gaz aux prescriptions générales de sécurité qui leur sont applicables.
Les caractéristiques, notamment géométriques des cartouches, sont définies par cette  norme : cartouches métalliques pour gaz de pétrole liquéfiés, non rechargeables, avec ou sans valve, destinées à alimenter des appareils portatifs.
Cette norme prévoit les deux types de cartouches : d’une part, les cartouches simples sans dispositif particulier (chapitre 4.3 de la norme relatif aux « cartouches perçables » notamment de type 200) et, d’autre part, les cartouches à valve (chapitre 4.4 de la norme notamment le paragraphe 4.4.1.1), c’est à dire munies d’un dispositif anti-fuite.
« 4.4.1.1 Exigences générales pour tous les types de valve. Les cartouches à valve doivent être :
a) D’une conception telle qu’il ne soit pas possible de faire fonctionner la valve sans utiliser un adaptateur spécial.
NOTE : le raccord prévu sur l’appareil destiné a être utilisé avec la cartouche à gaz peut être considéré comme un adaptateur spécial.
 
b) Equipées d’une protection évitant toute ouverture intempestive.
Les valves doivent être telles que, dans les conditions normales d’utilisation, elles se ferment lorsque l’adaptateur spécial est retiré ou lorsqu’elles ne sont plus actionnées. Les valves qui ne se ferment que sous l’action de la pression interne du gaz ne sont pas admises.
Après 50 manoeuvres d’ouverture et de fermeture, les valves ne doivent présenter ni fuite ni autres défauts (voir 6.6).
La coupelle de valve éventuelle ne doit comporter ni bavures ni bords vifs ».


B. Les appareils

Les caractéristiques des appareils d’utilisation de cartouches perçables sont définies par la norme NF EN 521. Cette dernière s’applique aux appareils à gaz utilisant des cartouches perçables conformes à la norme EN 417. Cette norme est placée sous la responsabilité du CEN/TC 181, suivi au niveau français par la Commission de normalisation BNG 181 du bureau de normalisation du gaz (BNG).
En 2001, les autorités néerlandaises ont émis une objection formelle auprès de la Commission européenne contre la norme EN 521. Selon elles, certains appareils respectant cette norme pourraient présenter un risque lors du remplacement de la cartouche perçable si les instructions n’étaient pas respectées (étude du TUDelft « Replacing pierceable cartridges in gas lamps » par Freija H. Van Duijne et Heimrich Kanis).
Au terme de son enquête, la Commission européenne a confirmé la présomption de conformité de la norme EN 521 aux exigences essentielles de la directive “appareils à gaz”. Elle a toutefois estimé que les évolutions techniques survenues depuis la publication de la norme permettaient une révision de cette norme qui prenne en compte le risque résultant de conditions particulières d’utilisation. Elle a donc émis un mandat (M327) demandant au CEN/TC 181 de compléter la norme EN 521 afin d’augmenter encore le niveau de sécurité intrinsèque des appareils lors des opérations de remplacement des cartouches.
Ce travail a été réalisé par le groupe CEN/TC 181WG4 qui, après une étude préliminaire, a proposé une révision de la norme EN 521. Dans le cadre de cette révision, la Commission de normalisation BNG 181 a proposé un vote positif sur ce texte et émis un commentaire visant même à améliorer la sécurité des appareils afin de limiter les échappements incontrôlés de gaz lors des opérations de remplacement de la cartouche perçable qui ne seraient pas effectuées dans des conditions normales (cartouche non vide).
Le projet de norme révisée a donc été adopté et est en cours de publication par l’AFNOR. La version française est en cours de rédaction et sera bientôt disponible.

La norme révisée prévoit dans son article 5.7.2.1 des prescriptions destinées à éviter tout risque, notamment lors du changement de cartouche :
« 5.7 Raccordement 5.7.1 Généralités
 
Quel que soit le type de récipient de gaz (cartouche perçable ou à valve avec ou sans cheminée, réservoir rechargeable…), le raccordement de l’appareil au récipient de gaz, effectué en suivant les instructions de la notice, doit se faire aisément et sans fuite de gaz (ou une fuite minimale).
 
Dans le cas des appareils raccordés directement, de façon rigide, au(x) récipient(s) de gaz, le dossier technique d’examen CE des appareils doit comprendre les plans et spécifications des récipients de gaz (y compris leurs raccords de sortie gaz) indiqués pour l’alimentation des appareils.
 
5.7.2 Appareils fixés directement sur le récipient de gaz
 
5.7.2.1 Appareils fixés sur des cartouches perçables
 
- la conception/construction de l’appareil doit être telle qu’il n’y ait pas de séquence du mode opératoire de remplacement prévisible qui puisse entraîner une perforation dangereuse et/ou involontaire de la cartouche par l’utilisateur ;
 
-  le support de cartouche et le dispositif de perforation doivent être tels que :
 
1)      la perforation soit centrée sur l’emplacement prévu ;
2)      l’étanchéité soit réalisée avant la perforation ;
 
- l’opération de mise en place de la cartouche étant terminée, il ne soit pas possible, de manière instantanée et accidentelle, d’enlever la cartouche sans enlever au préalable le dispositif incluant le perforateur.
 
Les schémas indiquant la séquence correcte de mise en place de la cartouche dans l’appareil doivent figurer sur l’appareil. »
Le projet de norme relatif aux appareils utilisant des cartouches de gaz propose des solutions techniques qui éviteraient d’introduire la cartouche de manière incorrecte. Par exemple, le perçage ne pourrait avoir lieu que si la cartouche est correctement positionnée dans le corps de l’appareil. La société Campingaz a fait parvenir à la CSC deux modèles différents d’appareil utilisant des cartouches de gaz, réalisés dans l’esprit de la nouvelle norme. Il serait dès lors quasiment impossible d’effectuer (involontairement) une fausse manœuvre lors du remplacement de la cartouche.
   

Toutefois, la sécurité des appareils d’utilisation de conception plus ancienne et antérieure à la nouvelle norme EN 521 ne peut être dissociée de la sécurité des cartouches perçables. Ces appareils dont l’utilisation est saisonnière ou occasionnelle, ont une grande longévité, ils se prêtent facilement et l’utilisateur est souvent mal informé et peu expérimenté. Lors de la réunion de détermination de la position française pour le vote relatif à la révision de la norme EN 521, la Commission de normalisation BNG 181 a estimé nécessaire de faire également évoluer la norme EN 417 pour y apporter des spécifications complémentaires, tenant compte des évolutions technologiques, qui permettraient de limiter le débit de gaz des cartouches perçables dans le cas où la performation de la cartouche n’a pas été réalisée correctement ou lorsqu’une cartouche contenant encore du gaz s’est désolidarisée de l’appareil.
Ces spécifications peuvent être très simples, les prescriptions de la norme EN 417 étant, à notre sens, dans leur ensemble pertinentes. Il suffirait, par exemple, d’ajouter le paragraphe suivant : “Dans les conditions d’essai (à préciser), une cartouche perforée ne doit pas permettre un dégagement de gaz supérieur à x cm3 (à définir) par minute”, ce qui est techniquement tout à fait réalisable. Une proposition de méthode de mesure a été proposée par un des fabricants de cartouche.
La Commission de normalisation BNG 181 a écrit à l’AFNOR en ce sens (lettre BC/BNG181/2005-545 du 1er décembre 2005) et celle-ci a lancé une consultation afin de recueillir l’avis des membres de la commission de normalisation E 29 H sur la possibilité de réviser la norme EN 417 et de soumettre cette question aux instances européennes. La modification doit être demandée par 5 pays au minimum. Il convient de préciser que cette norme a été révisée en 2003 et qu’elle sera proposée à la révision en 2008 (tous les 5 ans).
Le bureau de la sécurité des équipements industriels au ministère de l’industrie a, dans le cadre des spécifications de la directive “Equipements sous Pression transportables” (à laquelle est rattachée la norme EN 417), soutenu cette demande de modification.
Bien que le nombre d’accidents soit, a priori, faible ramené au nombre de cartouches commercialisées, le nombre d’incidents ne conduisant à aucune blessure (ou à des blessures légères) ou ne provoquant aucun (ou peu) dégât matériel est certainement bien plus important. Il convient, en particulier grâce aux avancées technologiques, de faire en sorte que la sécurité de tout utilisateur soit pleinement assurée.


SUR LA BASE DE CES DONNÉES

Considérant que ce n’est pas la cartouche de gaz perçable, de manière isolée, mais bien le couple indissociable qu’elle constitue avec l’appareil à gaz qu’il convient de sécuriser à l’égard des consommateurs, puisque c’est à l’occasion des opérations de placement et de remplacement de la cartouche sur l’appareil que surviennent les incidents ou les accidents ;
Considérant que deux démarches distinctes ont attiré l’attention de la CSC :
-      en 2001, les autorités Néerlandaises ont émis une objection formelle, auprès de la Commission Européenne, contre la norme harmonisée EN 521 relative aux appareils, en se fondant sur les exigences de la directive « appareils à gaz », suite aux résultats d’une étude du TUDelft « Replacing pierceable cartridges in gas lamps » par Freija H. Van Duijne et Heimrich Kanis selon lesquels les appareils à gaz respectant cette norme pouvaient présenter un risque lors du remplacement de la cartouche de gaz perçable si les instructions d’emploi n’étaient pas scrupuleusement respectées,
-      en 2004, le Centre régional des grands brûlés de l’hôpital de la Conception à Marseille, se fondant sur une accidentologie avérée, a saisi la CSC du danger présenté par les cartouches préremplies de gaz liquéfié dites “perçables” et répondant aux prescriptions de la norme européenne EN 417.
Considérant que la norme EN 521 révisée est en cours de publication par l’AFNOR et que celle-ci prévoit dans son article 5.7.2.1, des prescriptions relatives à la conception de l’appareil visant à éviter une perforation dangereuse et/ou involontaire lors du changement de cartouche ;
Considérant que les prescriptions de la norme EN 521 révisée applicable aux appareils à gaz semblent susceptibles, dans l’état des informations disponibles, de répondre aux exigences de sécurité attendues lors des manipulations nécessaires au changement de la cartouche ;
Considérant que le délai au terme duquel les appareils actuellement en service ne seront plus utilisés par les consommateurs sera probablement long ;
Considérant qu’il convient donc de proposer aux utilisateurs des appareils en service ne répondant pas aux exigences de la norme EN 521 révisée, des solutions pour effectuer en toute sécurité les opérations de remplacement de la cartouche perçable préremplie de gaz.


ÉMET L’AVIS SUIVANT :

1.       Les autorités françaises devraient engager, dans les meilleurs délais, la procédure de modification de la norme EN 417 relative “aux cartouches métalliques pour gaz de pétrole liquéfié, non rechargeables, avec ou sans valve, destinées à alimenter des appareils portatifs” (dont la dernière mise à jour date d’octobre 2003) afin qu’elle inclue explicitement des spécifications visant à limiter une éventuelle fuite de gaz, en deçà d’un certain seuil qu’il convient de déterminer, au moment de la mise en place ou du retrait de la cartouche, de façon à ce qu’une erreur ou un incident de manipulation, quels qu’ils soient, n’entraînent aucun danger pour l’utilisateur.
 
2.       Dans cette attente, les industriels et autres professionnels du secteur devraient :
-      favoriser la conception, la fabrication et la diffusion des cartouches sécurisées,
-      promouvoir, par des actions commerciales ciblées, le remplacement des appareils anciens par des appareils conformes à la norme EN 521 révisée,
-      améliorer la signalétique figurant sur les cartouches de manière à alerter le consommateur sur la bonne procédure de changement de cartouche, notamment en les présentant sous emballage, avec un avertissement clairement lisible : “AVERTISSEMENT : lire et se conformer à la procédure de remplacement imprimée sur la cartouche”.

3.       Quant à elle, la Commission éditera une fiche de prévention destinée à informer les utilisateurs de ces cartouches sur les risques inhérents à l’utilisation des anciens appareils et pour les inciter à se servir de cartouches sécurisées ou à acquérir des appareils conformes à la norme EN 521 révisée.


ADOPTÉ AU COURS DE LA SÉANCE DU 27 AVRIL 2006
SUR LE RAPPORT DE MADAME MARIE-LOUISE AUBIN-SAULIERE

Assistée de Monsieur Jean Michel MAIGNAUD, Conseiller Technique de la Commission, conformément à l’article R. 224-4 du Code de la Consommation





[1] Un des derniers accidents signalés à la Commission concernait un réchaud. Le dispositif d’allumage piézo-électrique aurait été actionné par mégarde par le consommateur apeuré par la fuite de gaz.
Exemples de conceptions d’appareils qui correspondent
aux nouvelles exigences de la norme EN 521

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