Permaculture et construction naturelle : la terre crue de A à Z

Permaculture et construction naturelle : la terre crue de A à Z


Une importante partie du sous sol français est composé de terre argileuse, une aubaine en permaculture car il s’agit d’un des meilleurs matériaux de construction, durable et naturel.
La terre est composée de sable, de limons et d’argile. Il faut généralement creuser à 20 ou 30 cm de la surface, sous la terre végétale, pour trouver de la terre utile à la construction.
On note la différence de terre par un changement de couleur net. Pour faire une analyse basique de la terre dont on dispose, on utilise un bocal. On le remplit d’un tiers de terre et on complète avec de l’eau. On le mélange, puis on laisse reposer environ une heure. Une fois que tout s’est déposé au fond, on remue de nouveau et on laisse reposer environ une nuit, ce qui permet d’avoir une analyse un peu plus précise.
La première couche qui se dépose est le sable (il peut y avoir une seule couche ou deux s’il y a deux épaisseurs de grains), la seconde correspond au limon (parfois en petite quantité qui ne se voit pas dans le bocal) et la dernière à l’argile. C’est par
rapport au pourcentage d’argile dans une terre que l’on définit ses caractéristiques (riche en argile ou non).
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Le taux d’argile dans une terre va donner la technique la plus adaptée à utiliser car toutes les terres ne sont pas adaptées à toutes les techniques. Cela dit, les terres peuvent être modifiées. Si une terre est trop argileuse, on peut y ajouter du sable. Si elle est trop sableuse, on y ajoute un liant (chaux).
Pour stocker la terre, le mieux est de la mettre sous un toit avec des courants d’air
(un hangar). Il faut par contre éviter de la laisser sous une bâche car elle se transforme vite en boue à cause de la condensation.
Le mélange eau et terre tamisée très liquide s’appelle la « barbotine ».

Les techniques d’eco-construction en terre crue

La bauge

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La bauge se trouve traditionnellement en Normandie.
Le taux d’argile dans la terre doit être de 20/30 % au moins. A 50/60 %, la terre se casse au séchage.
La terre doit être boueuse lorsqu’on l’utilise. On la jette au niveau du mur et on ne tasse pas (impossible car elle est boueuse). On monte le mur sur environ 80 cm, puis on le recouvre d’une couche de branches. On laisse sécher et on recommence
jusqu’à arriver en haut. La bauge peut être fibrée avec de la paille.

L’adobe

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L’adobe est d’origine arabe.
Le taux d’argile dans la terre doit être de 20/30 %. Elle se travaille à l’état « plastique », c’est-à-dire avec de l’eau.
Une brique d’adobe est une brique de terre moulée (dans un moule en bois) à la main et séchée à l’air quelques jours. Le séchage est déconseillé en plein soleil car les briques ont tendance à se fendre. Aujourd’hui, on rajoute de la paille à la préparation ce qui amène de l’isolation en plus, ce qui n’était pas le cas traditionnellement. Cela demande donc une terre avec un taux d’argile plus important. La proportion du mélange est d’environ 60 litres de terre pour 10 litres de paille.
Une brique d’adobe standard fait 43 x 28 x 5/10 cm. Mais toutes les tailles sont possibles, à partir de 16 cm de long.
On fabrique les briques d’adobe sur un terrain plat. Mieux vaut ajouter une couche de sable pour que les briques ne se collent pas au sol. On les fabrique généralement de mai à juillet car il leur faut un mois de séchage.
Mais après seulement 4/5 jours, on les redresse pour que l’air circule. On doit sabler le moule pour qu’il ne colle pas, mettre la terre à l’intérieur et tasser les coins. Puis avec un bâton rond que l’on fait rouler dessus, on égalise la surface de la brique. On démoule alors aussitôt avant de laver le moule (immédiatement).
Après 2 semaines, on peut les entasser selon une disposition précise avant de les bâcher pour les protéger de la pluie.
Pour la mise en oeuvre des briques, il faut les tremper dans l’eau avant de les poser si elles sont trop sèches. Le mortier est composé uniquement de terre (un peu moins argileuse que celle utilisée pour les briques), sauf sur les premières rangées où il vaut
mieux le réaliser en chaux pour éviter les remontées capillaires. Il s’applique à la main, sans aucun matériel.
La proportion du mélange pour le mortier (avec une terre à 25 % d’argile) est d’environ 2 volumes de sable pour un volume de terre. Pour les parois intérieures, il est intéressant de remplacer les deux premières rangées par des briques de terre cuite pour éviter les problèmes avec la serpillière, tout en remplaçant les plinthes.
Pour répartir les forces de la charpente, il faut installer des poutres sablières au sommet des murs.
Briques d’adobe de différentes tailles Petites briques retournées après 2 jours /avec leurs moules en bois Grosses briques pas suffisamment sèches.

Le pisé

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Le pisé se trouve traditionnellement en Picardie, dans le Poitou, le Lyonnais, en Rhône-Alpes, vers Clermont-Ferrand, dans le Gers, en Midi-Pyrénées, et dans le Maghreb.
Le taux d’argile dans la terre doit être de 10/15 % : elle ne doit pas être trop riche. Il peut y avoir des cailloux jusqu’à 5 cm de diamètre dans la terre, ce qui est avantageux car plus la terre est fine, moins il y a de résistance mécanique. L’épaisseur d’un mur est de minimum 60/70 cm (pour que ça ne s’écroule pas) et peut aller jusqu’à 2,20 m (exemple d’une forteresse vu en Midi-Pyrénées). Il se travaille selon une technique « sèche » : on a besoin de très peu d’eau. La mise en oeuvre se fait avec des banches d’en général 2 m de long sur 50/60 cm de haut.
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La terre peut être utilisée sans être préalablement brassée, sachant qu’il lui faut un taux d’humidité de 14/15 %. Elle est ensuite tassée à l’intérieur des banches grâce à une « dame » ou un « pissoir » (il en existe de plusieurs formats selon ce que l’on
tasse : les bords ou l’intérieur du mur), en commençant par les bords. En général, on met une couche de 15 cm de terre que l’on tasse jusqu’à qu’elle n’en fasse plus que 10. La mise en place des banches se fait en quinconce. La deuxième rangée
s’accroche à la première qui, une fois la terre arrivée suffisamment haut, s’enlève pour être installée en troisième position, et ainsi de suite… Les banches peuvent être enlevées immédiatement.
La densité du pisé est d’environ 1,2/1,3.
En général, on n’applique pas d’enduit sur le pisé car il est très solide par la présence
de gros cailloux. C’est aussi très beau car les strates peuvent être marquées.

Le torchis

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Le taux d’argile dans la terre doit être d’au moins 20 % (un peu comme l’adobe). Le torchis se fixe sur une ossature bois (colombage) plutôt en mélèze ou douglas. C’est un mélange de terre et de paille (tiges longues). Comme les tiges sont longues, le mélange est difficile à brasser. On le prépare donc en superposant différentes couches de terre puis de paille (imprégnée d’eau), en
terminant par l’eau. On le brasse ensuite soit à la fourche, soit en le piétinant, soit en le faisant piétiner par des animaux.
L’épaisseur minimale d’une cloison est d’environ 10 cm. La réalisation d’un torchis sera préférable au printemps ou en automne, quand la température est la plus adéquate. Entre chaque poteau de bois, on fixe des tiges obliques qui serviront de soutien au
mélange terre-paille. On forme alors des « boudins » de ce mélange que l’on coince entre les tiges, en partant du bas, et dans la direction opposée aux tiges, afin de permettre une meilleure fixation du remplissage dans son ensemble. Il est conseillé ensuite de marquer la terre du bout des doigts afin d’y créer une accroche pour l’enduit qui viendra dessus.
Le séchage dure ensuite 2 à 3 mois. A l’origine, l’enduit que l’on réalisait recouvrait également le bois afin de le protéger. Mise en forme des « boudins » de Mise en place des « boudins » de Trous formés avec les doigts pour terre terre dans la diagonale opposée l’accroche de l’enduit de aux tiges finition.

La BTC (Brique de Terre Compressée) ou BTCS (Brique de Terre
Compressée Stabilisée)

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La BTC se trouve principalement en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie.
C’est une technique récente que l’on rencontre surtout sur des projets humanitaires car les organismes financent les machines utiles à la fabrication des briques.
Le taux d’argile dans la terre doit être de 15/20 % d’argile. Il peut y avoir des cailloux jusqu’à 1,5 cm de diamètre dans la terre.
Pour la BTCS, on stabilise en général à 3 ou 4 % de chaux hydraulique ou de ciment. La proportion du mélange (avec une terre à 25 % d’argile) est donc d’environ 80 kg de terre et 20 kg de sable pour 4 kg de ciment.
Les dimensions de briques que l’on trouve le plus fréquemment sont :
- 29,5 x 14 x 9,5 : 8 kg la brique pour 33 briques au m² ;
- 22 x 10,5 x 6,8 : 4 kg la brique pour 50 briques au m² ;
- 30 x 20 x 10 : 13 kg la brique pour 26 brique au m².
La compression moyenne d’une brique est d’environ 25 kg/cm². Sa densité est
d’environ 1,9. Contrairement à la BTC, la BTCS comprend un stabilisant, un liant : chaux ou ciment.
L’avantage de la BTC (ou BTCS) est que, pour les mêmes caractéristiques que les autres techniques, on réduit considérablement les épaisseurs de mur. La BTCS est moins fragile, plus dure que la BTC. La fabrication des BTC se fait à l’aide d’une machine
spécifique. Avec la compression des briques, 2 m³ de terre se transforme en 1 m³ de BTC. Pour les BTC, on peut les mettre en place tout de suite, même s’il est préférable de les laisser sécher quelques jours pour ne pas abimer les angles, car une
BTC est assez fragile. Pour les BTCS, on les stocke, empilées et bâchées, sur des palettes. On réalise alors une « cure humide » : on
arrose les briques tous les 2-3 jours :
- pendant 6 semaines pour la chaux hydraulique ;
- pendant 2 semaines pour le ciment.
Puis le séchage dure entre 2 et 6 mois (sans les bâches). La fabrication des briques à la chaux ou au ciment est déconseillée en été car il fait trop chaud et il est alors difficile de réaliser correctement la cure humide. Un mur porteur doit faire au minimum 20 cm de largeur. Avant de les poser, il faut mouiller les briques afin qu’elles se collent plus facilement. Le mortier peut se faire à la terre ou à la chaux. Mais le joint final se fait toujours à la terre pour un aspect esthétique, car les BTC (ou BTCS) sont rarement enduites. Dans ce cas, il est intéressant de passer (au pinceau) une cire d’abeille incolore pour protéger des poussières.
Pour faire les joints, il est conseillé de laisser dépasser le mortier lors de la pose. Puis à l’aide d’une truelle, on gratte ce qui dépasse. Pour terminer, avec d’une éponge, on régularise les surfaces pour rendre homogène les joints.
La BTC (ou BTCS) a l’avantage de permettre de nombreuses formes : niches, arcs, frises…
Tout comme pour l’adobe, mieux vaut remplacer les premières rangées par des briques de terre cuites.

Le damier

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Le damier est une technique importée d’Italie, de la région d’Abruse. On en trouve
dans le sud du Gers.
C’est une alternance de blocs de terre et de gros galets.

Le terre-paille

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La technique terre-paille est une technique moderne réalisée sur une ossature en bois.
Le mélange utilisé comprend plus de paille que dans le torchis. Pour le préparer, on tamise la terre à 1,5 cm, puis on la jette dans la bétonnière avec de l’eau. Il est important de toujours remuer pour que l’argile reste en suspension. On sort la boue que l’on met dans une remorque dans laquelle on rajoute la paille (imprégnée d’eau). On laisse alors le mélange s’imprégner une nuit avant de l’utiliser. Il faut faire un coffrage entre les poteaux d’ossature et y tasser la terre-paille. Puis les
banches sont retirées immédiatement. L’intervalle entre les poteaux peut être plus grand que dans le torchis et, comme on
n’installe pas de tiges en bois, on utilise beaucoup moins de bois. La largeur moyenne d’un mur est de 28 cm pour un poids de 200/300 kg/m³.
A vous de jouer!!!
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